À l’intention des responsables de partis et membres du Nouveau Front populaire,
Nous, maires et élu·es locaux du Nouveau Front populaire, souhaitons vous écrire. Nous souhaitons vous faire part d’une colère profonde. Après l’immense espoir d’il y a quelques semaines, nous voyons monter aujourd’hui une exaspération massive de nos habitantes et habitants face à vos manquements. Voilà que l’inimaginable rêve de plus de justice et d’égalité, d’un projet d’apaisement et de bifurcation écologique, se heurte à vos chamailleries boutiquières. Et nous, face à eux, avons honte de trahir cet espoir !
Vous avez su vous rassembler pour la présidence de l’Assemblée nationale avec la candidature unique d’André Chassaigne. Le macronisme moribond sauvé par un petit marchandage avec la droite cupide a pu prolonger son déni démocratique en bloquant l’accès au perchoir de la force politique arrivée en tête au soir du second tour des élections législatives. Si, demain, nous sommes gouvernés par la droite, sans même avoir trouvé un nom et un dispositif gouvernemental, votre responsabilité sera immense. Le couvercle des affects négatifs, ceux du ressentiment, de la déception et de la colère, qui sont le carburant de l’extrême droite, se rouvrira !
Oui, nous le savons, le sommet est haut et la pente est raide pour le Nouveau Front populaire. Gouverner n’est jamais chose aisée, surtout dans l’adversité. Les Françaises et les Français connaissent parfaitement la situation politique dans laquelle nous sommes placés. Ils l’ont choisie par leur vote contre le Rassemblement national (RN). Lors de la campagne, renoncement après renoncement, le RN a montré son incapacité à gouverner, ainsi que le fait qu’il n’avait pour seul projet que le racisme et la défense des puissants. Comment les Françaises et les Français pourraient comprendre que, confrontés au même défi, nous refusions à notre tour de sauter l’obstacle pour gouverner. Au nom de quoi ? D’une pureté programmatique entravée par une majorité relative ? D’un nom jeté en pâture qui ne cocherait pas toutes les cases ? À force de discuter sans fin sur la forme, nous allons toucher le fond ! Notre vie, celle de nos habitantes et nos habitants souffrent du présidentialisme à outrance et des stratégies d’hégémonie. Arrêtons les oukases, les violences par médias et réseaux sociaux interposés. Vos haines cuites et recuites ne nous concernent pas ! Pourquoi la coopération entre toutes les forces politiques de la gauche et des écologistes alliées à la société civile, qui fonctionne dans de si nombreuses villes et territoires, ne serait pas possible à l’échelle nationale ?
En un mois, vous avez réalisé l’impossible en proposant le programme du Nouveau Front populaire, en vous accordant sur une liste unique de candidature au premier tour et sur un désistement républicain au deuxième tour. Nous avons vu partout, dans nos villes, nos banlieues et, nos campagnes, se lever un peuple, militantes et militants, syndicaux, associatifs, de citoyennes et de citoyens, qui, face au risque du Rassemblement national, se sont mobilisés. Comment, demain, regarderez-vous dans les yeux ces hommes et surtout ces femmes, pour qui la revalorisation du smic permettra de vivre un petit peu mieux ? Comment parlerez-vous à ces familles qui vont, dès septembre, être mises en difficulté par les courses de rentrée ? Ou à celles et ceux qui, épuisés par le travail, vont devoir continuer à travailler jusqu’à 64 ans ?
Nous ne sommes pas dupes de la stratégie d’Emmanuel Macron, de son rapport ambigu aux logiques démocratiques d’alternance et de la droite usant de la menace d’une motion de censure, pour nous empêcher de gouverner. Face aux manœuvres, face à cette situation inédite, vous avez le devoir de l’unité. L’histoire vous regarde et oubliera toutes les manœuvres et toutes les diversions. Vous n’avez plus le choix. Continuez, trouvez des solutions et nous serons des millions à vous soutenir !
Les 20 premiers signataires :
- François Dechy, maire de Romainville (Seine-Saint-Denis) ;
- Marie-Françoise Nachez, maire d’Arboras (Hérault) ;
- Aurélien Taravella, conseiller départemental de la Haute-Garonne ;
- Fabienne Leguicher, maire de Norville (Essonne) ;
- Olivier Gravas, maire de Sahorre (Pyrénées-Orientales) ;
- Emmanuelle Rasseneur, maire de Gourlizon (Finistère) ;
- Jacques Sonilhac, maire de Sansan (Gers) ;
- Gaëligue Jos, maire de Saint-Michel-de-Bannières (Lot) ;
- Stéphane Delpeyrat-Vincent, maire de Saint-Médard-en-Jalles (Gironde) ;
- Léa Filoche, maire adjointe à la maire de Paris ;
- Jean-François Bridet, vice-président de la région Centre-Val-de-Loire ;
- Marie Pragout, vice-présidente de la Charente ;
- Etienne Bonnin, maire de Saint-Maugan (Ille-et-Vilaine) ;
- Céline Veron, conseillère régionale Pays-de-la-Loire ;
- Roberto Romero, conseiller régional d’Ile-de-France ;
- Marie Batoux, adjointe au maire de Marseille (Bouches-du-Rhône) ;
- Mohamed Gnabaly, maire de L’Ile-Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) ;
- Laetitia Hamot, maire de La Crèche (Deux-Sèvres) ;
- Arthur Boix-Neveu, maire de Barberaz (Savoie) ;
- Véronique Bertholle, adjointe à la maire de Strasbourg (Bas-Rhin).